piqûre de rappel — kokomi

Après un énième soupir, la main de sa mère vint frapper l'arrière de son crâne. Avertissement pour lui dire qu'il fallait qu'elle arrête et que personne ne changera d'avis par rapport à cette journée. Plus tôt dans la semaine, alors que Kokomi parlait de ses entraînements éreintant avec Tameda-senseï, son père lui avait dit qu'il avait discuté de son cas et que le père d'un de ses anciens camarades Nara avait proposé les services de son fils pour remettre à niveau la petite Senju. Si au départ, avec son grand sourire, elle lui avait répondu que "c'était très gentil d'avoir proposé mais, non merci", on lui rétorqua qu'elle n'avait pas son mot à dire et que de toute façon il fallait qu'elle arrête d'être à la traîne. Un œil tourné vers son frère qui pour une fois ne lui était d'aucune aide. C'est à ce moment qu'elle a su qu'elle était perdue, que ce serait une obligation incontournable. Pourtant, Kokomi savait d'avance que ça ne servirait à rien. Il n'y avait que Saki, Koshiro et son senseï qui comprenant comment lui apprendre, qui l'intéressaient assez pour qu'elle se concentre. Or aucun d'eux n'était un Nara.

Avant de partir, sa mère lui confia un petit panier, "cadeau pour le nouveau professeur" qu'elle disait, juste une façon de s'excuser par avance pour le temps qu'il aura perdu avec sa mauvaise élève. Une grande respiration avant de partir, Kokomi se sentait prête à faire des efforts. Après tout, elle voulait y arriver. Il y aurait peut être moyen, sur un malentendu d’apprendre quelque chose. Pourtant, comme si son inconscient la rattrapait, elle traînait des pieds jusqu’aux terrains d’entraînement, se laissant distraire à loisir sur le chemin. Mais voyant le lieu de rendez-vous de loin, et se rendant compte de son retard, la demoiselle pressa le pas pour rejoindre son ancien camarade. A vrai dire, elle n’avait pas cherché à savoir qui ça serait. Mais de loin elle l’avait deviné, contre un arbre à lire, d’un air aussi nonchalant qu’à l’Académie. Le Nara était Komyo et juste pour ça, la jeune genin aurait voulu jeter le panier de sa mère. Il était, d’après elle, typiquement le type de personne qui la prenait de haut. Elle savait bien qu’ils étaient nombreux à le faire, et elle ne leur jetait pas la pierre. Simplement ce qui le rendait particulièrement insupportable c’était ses airs de génie absolu. Il donnait l’air de tout réussir sans faire grand chose. L’injustice totalement. C’en était rageant même pour quelqu’un qui ne voulait pas particulièrement faire partie des meilleurs. Mais après tout, il avait peut-être changé. Ça faisait plus d’un an qu’ils ne s'étaient pas vus et tout le monde avait le droit d’évoluer. Cette pensée la surprit elle-même, elle ne se pensait pas si mature. “ Hey yoooo ! ” Qu’elle lançait de loin tout en s’avançant énergiquement. Elle le savait que cette fois il n’y aurait aucune chute, tout était minutieusement calculé et ses fesses ne toucheraient pas le sol.

En arrivant près de lui, Kokomi pencha la tête devant la couverture de son livre. “ Tu t’inspires de tes aînés ou tu fantasmes d’une grande aventure à peine croyable ? ” Un léger gloussement à sa spontanéité sans introduction. Avant toute chose, la kunoichi ratée tendit le panier à son ancien camarade. “ Ma mère a fait ça pour toi, j’espère que ça te plaira. Au fait, tu vas bien ? Et puis t’as prévu quoi pour aujourd’hui ? Tu sais t’étais vraiment pas obligé… même si c’est gentil hein ! Je dis pas le contraire. Juste qu’il fait chaud et beau ! On pourrait faire autre chose non ??” La fourbe essayait quand même de se dérober en corrompant son nouveau professeur. Elle s’était dit que pourquoi pas, ce serait peut être le genre à accepter. Mais au fond la petite Senju se doutait qu’elle n’y échapperait pas, contre aucun pot de vin.

Kokomi répondit à sa remarque sur son retard par un simple rire, l'air de dire "Cours toujours !" sans en avoir la forme. De toute façon elle était bien plus intéressée par sa lecture que le reste. Elle se souvenait qu'on lui en avait lu un bout avant de le laisser sur sa table de chevet dans l'espoir qu'elle continue. Lire ça demandait peut être trop de concentration, après une page son esprit vagabondait déjà, mais quelques fois quand même elle avançait. Page par page. Aussi c'était étrange de voir un garçon de son âge le lire aussi, ce n'était pas courant qu'on s'intéresse à ce genre d'ouvrage. Cette fois, il mobilisait sa concentration et son enthousiasme. "C'est ce que j'essayais d'expliquer aux autres pendant Hanami !" Qu'elle se rappelait que Kiri avait été au centre des attentions durant la fête, grâce à sa délégation envoyée à Konoha. "Impossible de leur faire comprendre que les Kirijin allaient voir leur tout premier feu d'artifice ! Bah oui s'il fait trop humide, comment ils pourraient les allumer ? Et puis comment bien les voir aussi ? C'est impossible." Appuyant chacune des syllabes de son dernier mot comme l'évidence même. Elle aurait tellement voulu continuer à en parlant, entre connaisseurs. Mais déjà le garçon coupait court et changeait de sujet, il le faisait littéralement en tapant gentiment la tête de la petite Senju avec son livre. Si seulement elle ne s'était pas pris un coup le matin même au même endroit, ça ne lui aurait fait aucun mal. Mais là elle se sentit obligée de venir frotter de sa main l'endroit de l'impact.

Apparemment, Komyo était du genre à craindre ses parents. C'est vrai que, sans qu'on sache comment, ils savaient toujours tout ces fichus parents. Des monstres qui guettaient la moindre opportunité pour les attendre à l'entrée afin de leur passer le savon de leur vie. " Alors c'est comme ça que ça marche ? On t'achète avec un panier bien préparé et tu suis tout ce qu'on te dit ? Les hommes j'vous jure..." Pleine d'emphase et de sous-entendus qu'elle ne comprenait même pas. Simplement le genre de chose qu'elle avait déjà surpris ça et là mais qui n'avait pas beaucoup de sens pour elle. La jeune genin, aussi versatile qu'imprévisible se sentit comme une enfant alors qu'on lui promettait autre chose que du travail. "Autre chose ?? Vraiment ? Bon... je vais faire des efforts alors." En espérant que ça suffise.

La demoiselle était partagée. A la fois elle ne le trouvait pas aussi désagréable que d'habitude. Mais en même temps il avait toujours la même façon de parler et ses airs supérieurs. "J'imagine que... si on voulait combler mes points faibles on serait encore là la semaine prochaine alors... on va dire que je suis plus partante pour de la pratique ?" Enfin elle esquissa un rire nerveux à la consigne. Ses pieds venaient piétiner le sol, elle essayait de gagner du temps. Mais de toute façon il n'allait pas la lâcher et il fallait qu'elle se plie à sa question. "Mmmh... Je dirais qu'en point fort je suis... observatrice ? Un truc comme ça et puis sinon en point faible... Je suis bruyante, très maladroite, trop distraite..." Ses yeux essayaient de chercher une échappatoire mais aucune n'existait. Finalement ils revenaient vers son camarade. "Est-ce qu'on peut dire que trouver qu'être shinobi c'est vraiment pas marrant, c'est un point faible en tant que shinobi ?" Ses joues en devenaient rouge de honte. Bien sûr qu'elle savait tout ça, ça n'avait rien de nouveau, mais l'avouer à Komyo, alors même qu'ils ne se parlaient pas beaucoup, c'était autre chose. "Tu vois c'est pour ça que je te dis qu'il vaut mieux faire autre chose de cet après midi. J'suis un genre de cas déséspéré !" Qu'elle finissait par lui dire avec un grand sourire, sans gommer le rouge qui avait empourprer ses joues.